Cette année là, je venais de passer mon bac. J'avais dix-sept ans. J'étais puceau. Il m'était bien arrivé de rouler deux ou trois galoche par ci, par là mais rien de bien sérieux. De toutes façons les filles ne m'intéressaient pas. Mes parents sont partis en voyage, pour fêter leurs vingt ans de mariage et je n'ai pas eu besoin de beaucoup insister pour qu'ils me laissent seul à la maison. J'avais là l'occasion de concrétiser le phantasme qui me travaillait depuis des mois, qui tendait mon sexe et ne s'apaisait même pas après plusieurs branlettes sauvages, de vraies fringales qui me prenaient jour et nuit. Pour commencer, j'allais rendre une petite visite à la garde-robe de ma mère. Comme elle forcissait un peu ces derniers temps, elle avait laissé de côté une jolie robe à fleur, bleue, toute légère. Rien qu'au contact du tissu, j'en avais la chair de poule. Mon choix se porta également sur un ensemble en dentelle blanche et des collants quelconques. Ma mère ne portait pas de bas, ce qui me laissait un peu démuni. J'allais remédier à cela sous peu. Une fois les affaires rassemblées sur le lit, je passais à la salle de bain. Pratiquement imberbe, je ne me rasais que rarement. Pour la réalisation de mon plan, je pratiquais une épilation intégrale à la cire chaude. J'avais acheté tout mon petit matériel, spatule et compagnie. Seule mes parties génitales échappèrent à l'opération. Je me contentais de tailler les poils pubiens pour qu'ils "ne dépassent pas du maillot". Retirer la cire ne fût pas une mince épreuve. A la fin ma peau était rouge et irritée. Mais j'avais des jambes douces de petite fille. Après une bonne douche, je me rendis dans la chambre. La petite culotte et les bas m'allaient sans trop de problèmes, ma mère n'étant pas un petit gabarit. Je dus rajouter du coton dans le soutien-gorge. Puis ce fût la séance de maquillage. Je ne passais pas par quatre chemins : une bonne dose de fond de teint et de poudre, pour dissimuler un hypothétique vestige de pilosité, du bleu et du mascara pour les yeux, un rouge bien vif largement étalé sur les lèvres. La partie la plus délicate fût l'ajustement des faux ongles. Je les couvris ensuite d'un beau carmin. Une fois les ongles secs, j'enfilais la petite robe. Pour parachever mon œuvre, j'ajoutais une perruque brune et bouclée, un autre de mes achats, et une paire de chaussures empruntées à ma mère. Comme de bien entendu, elles étaient beaucoup trop petites pour moi. Enfin je me présentais devant la glace. Le résultat me coupa le souffle. J'étais devenu une femme. Une belle jeune femme. Quelques détails suffisent, à dix sept ans, pour changer de sexe. Depuis des années, je reniflais et je portais des vêtements féminins piqués à droite à gauche. Jamais on ne m'avait pris en flagrant délit. Jamais la transformation n'avait été poussée à ce point. Un frisson violent irradiait de mes testicules et de mon rectum dans tout mon bassin. Je ne bandais pas mais un peu de liquide clair s'écoulait de mon sexe. J'éprouvais une très forte envie d'aller fouiller l'armoire pour récupérer une bougie et me la fourrer dans le cul, comme je l'avais déjà fait à plusieurs reprises. Mais cela supposait de retirer mes vêtements, au moins mon slip, ce qui aurait gâché mon plaisir du moment. Je passais le reste de l'après-midi à déambuler, histoire de me faire à ces fichus chaussures à talons. Mon grand projet ne tenait qu'à cette seule condition : avoir l'apparence d'une vraie femme. A l'heure du départ, je me parfumais de la tête aux pieds et appelais un taxi. Un quart d'heure plus tard, la voiture se garait devant la maison. D'une voix fluette, je donnais l'adresse d'une boîte à la mode, le Bianchi. Livide sous le maquillage, me résolutions s'envolaient une à une. J'eus soudain la certitude que tout le monde verrait la bosse sous ma robe, mon infâme queue, fixée par du sparadrap pour l'heure mais toute prête à se dresser comme un drapeau en criant : "Eh ! c'est moi la bite d'Alex ! ne vous fiez pas aux apparences, lui, ce n'est pas vraiment une femelle, c'est un travelo, une immonde pédale..."
Le vigile me jeta un bref coup d'œil et me fit signe d'entrer. Soit il n'avait aucune idée de ce que j'étais réellement, soit il s'en fichait. Cependant, je faisais sans doute plus que mon âge, il ne m'avait pas réclamé de carte d'identité. Je bénéficiais du demi-tarif, avantage d'une femme seule en boîte. La fille du vestiaire ne parût pas plus intriguée par mon allure. Je commençais par prendre le verre gratuit au bar, histoire de me désinhiber un peu. Le serveur me gratifia d'un sourire pendant que je buvais à petites gorgées le whisky coca. Un garçon très mignon, blond et bronzé, la vingtaine, se posa à côté de moi. Il me proposa un autre verre. Je testai mes intonations en acceptant. Pas de malaise. Il s'appelait Eric. Je m'inventais toute une vie, une histoire parallèle à la mienne. Il écoutait mes fausses confidences en souriant. A l'heure des slows il m'invita à danser. Tant bien que mal, je tentais d'éviter de me coller contre lui. Il m'embrassa longuement, c'était délicieux. Je m'abandonnais au confort doux et chaud de ses bras. La tête me tournait, j'oubliais tout. Ce ne fût que dans sa voiture que je réalisais jusqu'où m'avait mené mon ivresse. Eric posa la main sur ma cuisse. Je lui dis que je ne me sentais pas bien, que je préférais rentrer chez moi. Je lui donnais une fausse adresse, pas très loin de la maison. Il me laissa son numéro de téléphone, je promis de l'appeler. Triste fin de soirée.