de Janus le 25 Fév 2004, 14:54
L. était seul chez lui et s'ennuyait, un dimanche soir comme tous les autres dimanche soir. La lumière déclinait doucement sur les toits de Paris qu'il observait de la fenêtre de son studio. Il mit son P.C. sous tension. L. regarda avec tristesse le défilement des instructions de démarrage, chiures absconses, échos de la pluie sur les ardoises. Il n'avait rien fait de sa journée et pensait n'avoir rien fait de sa vie. Il se demanda si, du fond de ce cloaque où l'enfermait sa grotesque maladie, sa dépression, il trouverait encore la force de décrire les fantômes qui le torturaient. Les mêmes phantasmes, jours après jours venaient le brûler, ne laissant qu'une sensation de vide. Il voulait écrire, écrire la voie du venin dans ses veines, écrire que sa cervelle cherchait à s'échapper de sa boîte crânienne. Plus tard, dans le moelleux de la nuit, il irait aux putes.
Quand on frappa à la porte, pas un instant, il ne se douta que c'était elle. Il vit ses yeux rougis et lui dit : "entre" tout simplement.
- Je ne te dérange pas ?
- Non, répondit-il.
Suivit un long silence qu’il brisa :
- Tu veux boire quelque chose ?
- Un Coca, une bière, ce que tu as…
Il lui versa une brune moussante. Il ne pencha pas assez le verre et l’écume s’étala sur le vernis noir de la table basse.
- Je ne vais pas rester longtemps. Excuse-moi, c’est idiot, je te fais perdre ton temps…
- Non, tu n’as pas l’air bien. Reste un peu… parle-moi… dis-moi ce qui ne va pas…
- J’ai rêvé de toi.
L. s’éclaircit la voix :
- Moi aussi, il m’arrive de rêver de toi… c’est tout à fait normal.
Les lèvres tremblantes, elle paraissait sur le point d’éclater en sanglots.
- Non, ce n’est pas normal ! ce n’est pas normal de rêver de toi de cette façon et, ensuite, de ne pas cesser de penser à toi.
Il perdit patience :
- Mais, enfin, explique-toi !
- Je me suis rêvée ton esclave dévoué, ta fidèle servante… ce sont des flashs, des histoires que je me raconte. Elle se mordit la main. Je fais des bêtises, dit-elle avec une voix de petite fille, je me touche, j’ai des pensées impures et tu me donnes une bonne fessée. Ou tu m’attaches avec une grande chaîne, dans un cachot humide et tu me livres à d’autres hommes, de véritables bêtes…
Il ne dit plus rien, il se leva et la prit dans ses bras. H. se blottit contre lui, elle se sentait en sécurité, à l’abri ; le malheur n’avait plus de prise. Elle chercha ses lèvres. Son sexe se dressait sous l’étoffe du jean. "Non… " dit-il. Elle clôt sa bouche d’un baiser humide, leurs langues s’effleurèrent. La brûlure envahit tout son corps, plus vivace que jamais ; il sût qu’ils ne résisteraient pas, que la folie aurait raison d’eux. Que peut-on contre le feu intérieur ? Sans doute auraient-ils honte ensuite, et qu’importe ? ils vibreraient à l’unisson.
- Et l’autre ? demanda-t-il bêtement.
- Il n’existe plus.
H. était déjà à ses pieds. Elle le libéra de son pantalon, fouilla son caleçon pour le gober à pleine bouche, le regard chaviré, les yeux fous. Il était déjà prêt, déjà dur. Il ne pouvait pas attendre, il voulait la pénétrer tout de suite. L. bascula H. sur le canapé, releva sa jupe, manqua d’arracher son slip avant d’écarter ses cuisses mais elle dit non, pas comme ça… elle voulait qu’il l’attache, la domine… Un regard circulaire lui permit de repérer son peignoir qu’il avait jeté négligemment dans un coin de la pièce, à même le sol. L. se saisit de la ceinture d’éponge. Il la retourna et lia ses poignets dans son dos. Il n’eut aucun mal à la pénétrer. H. cria, elle lui dit qu’il était le maître qu’elle attendait. Elle lui demanda s’il sentait son désir ; elle ajouta qu’elle devenait une vrai fontaine, dès qu’elle pensait à lui, à son sexe, qu’elle avait imaginé qu’il la baisait, de cette manière là. Il la prenait sans ménagement et chaque mouvement lui arrachait un cri. Il reconnaissait en elle, cependant, les yeux clos, éperdue de jouissance, celle qu’il avait toujours désiré, l’enfant pervers de ses rêves oubliés. "Oui !" hurla-t-elle quand il prit ses reins. Elle s’était ouverte pour lui, il la possédait complètement, au plus profond. A l’instant de leur jouissance, au plus fort de l’orgasme qui les crucifiait, il eût encore la force d’un souffle pour lui murmurer à l’oreille : "Je t’aime, petite sœur".