Plage

Il est vrai qu’aujourd’hui la mer était belle et calme. Il est vrai qu’aujourd’hui le ciel était bleu et que le soleil cognait dur. Il est vrai que j’éprouve un plaisir immense à lire un bouquin, le dos bien à plat sur le sable. Mais tout cela n’est rien, tout cela s’efface dans le restaurant, avec toi. Et non, je n’ose pas y croire, quand tu me dis que tu voudrais que je te raccompagne à l’hôtel et que je comprends que nous serons seuls, enfin.

Dans la voiture, pourtant, rien que l’horrible banalité du silence et mon habituelle impuissance à le neutraliser, comme si mon désir étouffait ma capacité à entamer une conversation. Que dire ? Je m’imagine brute, à t’annoncer que de toutes ces femmes dont les courbes s’affichent outrageusement en ces temps de moite villégiature tu es l’unique objet de mon attention. Comment d’ailleurs pourrais-tu l’ignorer ? Nombre de détails dans mon comportement de ces derniers jours t’ont sans nul doute alertée. Je me tourne vers toi, un sourire aux lèvres et tu me cueilles comme une fleur. Ai-je déjà pris un bain de minuit, me demandes-tu ? Je réponds par l’affirmative mais je saisis également le sens de ta proposition. Nous sommes sortis de la zone portuaire et nous longeons la plage bordée d’emplacements de parkings, vides à cette heure. La route est sous le feu des lampadaires mais, plus loin, la mer n’est éclairée que par une lune discrète.

Nous marchons sur le sable. Je n’ose pas prendre ta main, pas encore. Je finis par te dire que je n’ai pas de maillot de bain et tu me réponds que tu n’en as pas non plus et qu’on n’en a rien à foutre, le tout en faisant tomber ta petite robe légère à tes pieds. Je te regarde retirer tes sous-vêtements pendant que je m’empêtre dans mon jeans. Je vois ton dos nu et tes reins sous la lueur de la lune. Tu cours très vite et tu te jettes à l’eau. Quand j’atteins l’écume tu n’es déjà plus qu’un point dans cette immensité noire. Je suis saisi d’inquiétude. La mer parait calme mais si un courant nous entraine, qui viendra nous chercher ? Et les flics ? Si une patrouille remarque ma voiture ? Je nage au plus vite, vers toi. La mer a emmagasiné de la chaleur toute la journée mais, à cette heure elle a déjà commencé à se dissiper. Quand je te rejoins notre désir nous impose comme une évidence de rassembler nos corps. Dans le froid de l’eau salé, dans la nuit où l’on peine à deviner les traits de l’autre, nos bouches se rejoignent, nos bras et nos jambes s’entremêlent. Nous échangeons un long baiser.

Nous revenons là où j’ai pied et tu t’accroches à moi, tes jambes nouées autour de mes reins. Ce baiser ne semble pas avoir de fin, nos langues sont nées pour se rencontrer et s’aimer. Tout le feu de ces heures passées près de toi dans l’attente de cette étreinte se concentre dans le bas de mon ventre et j’ai peur de trop vite déverser dans la mer le fruit de mon ardeur.

Nous ne sortons pas de l’eau calmés, bien au contraire. Couchés sur le sable, je sème des baisers dans ton cou, j’enfouis mon nez dans ta chevelure, je caresse tes mains, tes bras, tes seins et le creux de tes cuisses. A tes soupirs, je comprends que l’attente pour toi aussi a rendu cet instant magique. Nous sommes dans la situation des amants égoïstes si accaparés par leur désir que le reste du monde peut bien se résoudre en apocalypse que nous nous en ficherions comme d’une guigne. Même si ces longues caresses s’avèrent un prélude, nous les savourons comme un bon vin. Ma bouche se pose sur la pointe de tes seins que je suce tour à tour. Ils me plaisent. Tout chez toi me plait. Mon attention se concentre sur un point plus précis et ma main touche ton sexe humide. Je veux en connaître le goût tout de suite et je porte mes doigts à la bouche. Ma caresse reste douce mais elle se fait plus insistante, j’écarte les grandes lèvres pour exposer davantage ton intimité. Mon pouce inquisiteur découvre une petite protubérance dressée qui devient le pivot de sa rotation impétueuse. Tu enfonces ta langue dans ma bouche en représailles. Vaine défense. A la manière dont tu te tors, j’ai sans doute déjà gagné le premier round. Ta main rejoint la mienne pour me guider, modérer le rythme. J’insinue deux doigts qui vont coulisser entre tes lèvres, leurs bases frottant contre ton clitoris. Un tremblement de bon augure secoue tes reins. Tu cries au moment de l’orgasme, puis tu me demandes d’arrêter la caresse quand le plaisir est insupportable.

Je me tiens au-dessus de toi et je sais que tu es prête. Tu m’embrasses encore avant de me dire, avec un petit sourire d’excuse poli, non, pas ce soir. Heureusement, ta main consolatrice enserre ma verge et la frictionne avec douceur. La jouissance enfle progressivement, comme un parcours douloureux de mes bourses vers l’extrémité de ma verge. Tu ne pousses pas la perversion jusqu’à me faire attendre plus longtemps. Le plaisir éclate et je souille ton ventre de longs jets blancs.

Après un court repos, nous retournons nous baigner. Mon appétit demeure, aiguisé comme une lame, mais je songe avec délice que les vacances sont loin d’être finies.