Auréline 16 – Le repas de Madame

Le journal d’Auréline III

Javier marche devant moi. Il se déplace lentement. Je fais de petits pas pieds nus sur le parquet ciré pour le suivre. J’ai toujours le goût de son sperme sur la langue.

Il ouvre une porte. J’entre dans la salle de bain. C’est une pièce spacieuse aux murs habillés de grands carreaux anthracite. Au-dessus du lavabo blanc à la robinetterie moderne, un miroir dont la bordure, laquée d’un noir brillant, rappelle les riches moulures encadrant les tableaux de musées.

Dans un angle, une cabine de douche mais c’est un autre élément mobilier qui attire mon attention. Je n’ai jamais vu une aussi grande baignoire de ma vie. Je crois que l’on pourrait facilement tenir à quatre dedans. Elle est équipée d’un système de jets d’air pulsé comme en témoignent les parois percées de petites valves.

A mon grand désarroi, Javier reste à côté de moi. Je n’ai qu’une seule envie : me brosser les dents.

– J’ai besoin de mes affaires de toilettes, lui dis-je.

Je me rends aussitôt compte que j’ai commis une bourde. Je n’ai pas eu le temps de le voir amorcer le geste que sa main s’abat sur ma joue droite. La gifle est vigoureuse mais il est bien loin d’y avoir appliqué toute sa force.

– Tu m’obliges déjà à te rappeler les règles, me sermonne-t-il sur un ton sec. En aucun cas tu ne dois m’adresser la parole sans y être invitée. Je ne suis pas ton domestique. C’est même plutôt l’inverse ! Débarbouille-toi rapidement, rince-toi la bouche si tu veux. Tu auras tout le temps de te laver avant de te coucher.

Je me regarde dans la glace. La peau un peu rouge porte son empreinte mais elle disparaitra vite sans laisser de marques. Je me rince le visage à l’eau froide. Hors de question de lui laisser le plaisir de me voir pleurer.

La tête basse, je lève timidement la main.

– Permission de parler accordée, dit-il.
– Je dois soulager une envie pressante, Monsieur.

Il semble apprécier la marque de respect.

– Je vais te montrer où sont les toilettes et je ne mentionnerai pas ton attitude à Maîtresse F. Tu peux m’en être reconnaissante.

Cette fois je peux m’isoler pour faire ma petite commission. De retour dans le couloir je constate que Javier s’est absenté. Ne sachant trop quelle attitude adopter, je reste debout devant la porte tout en me massant doucement la joue. Javier revient rapidement, une lanière en cuir à la main.

– Je ne pouvais pas laisser ton écart impuni.

Je suis sur le point de lui faire remarquer que j’ai déjà reçu une punition, une bonne claque en l’occurrence, mais la perspective d’une nouvelle rouste m’en dissuade.

Il me dit de me tourner et de relever les cheveux sur ma nuque. « Ouvre grand la bouche » ajoute-t-il avant d’y glisser une balle en caoutchouc et de refermer la boucle.

– Essaie de parler.

Je ne peux qu’émettre des borborygmes inaudibles.

– Très bien. Tu n’enlèveras ce bâillon que si je t’y autorise.

Je l’accompagne ensuite jusqu’à la chambre. Enfin chambre, c’est vite dit, il s’agit plutôt d’un cagibi aménagé. Si je m’attendais au même luxe que dans la salle de bain, j’aurais été cruellement déçue. La pièce est minuscule et dénuée de fenêtres. Un lit en fer étroit occupe la moitié de l’espace. Je remarque également un verrou à l’extérieur de la porte et un pot de chambre dans un coin. Une vraie cellule. Ne manquent que des bracelets pour m’attacher à la paillasse. Maintenant que j’y pense, je les porte déjà aux poignets et aux chevilles…

– Avec la cuisine, les trois pièces que nous venons de voir sont les seules où tu es autorisée à te trouver seule. J’espère pour toi que tu as bien mémorisé leurs emplacements. Si nous te croisons ailleurs dans l’appartement, tu ne couperas pas à une sévère punition cette fois.

Et tu aimerais bien t’en charger, non ? Je commence à penser que Maîtresse F. n’est peut-être pas le pire tortionnaire la maison.

Il me donne des gants en latex et un tablier. « Tu vas passer la prochaine heure à nettoyer, dit-il en désignant une éponge et du détergent. Après tu éplucheras les légumes et tu prépareras le dîner selon la recette qui est sur ce papier. Tu as intérêt à ce que le plat convienne à ta Maîtresse. Une fois le repas de Madame terminé, tu reviendras dans la cuisine et je te donnerai à manger. Tu nettoieras de nouveau la pièce. Pour finir Maîtresse F. désirera sans doute vérifier la propreté des lieux. »

Quel savoureux programme ! Je n’aurais jamais pensé faire l’armée. Garde à vous, soldat Auréline !

La cuisine, bien entretenue, ne demande pas énormément de travail mais quelque chose me dit que je dois consacrer du temps et de l’énergie aux différentes tâches qui me sont attribuées. Je fais bien attention à éliminer toutes traces de calcaire dans l’évier.

Je m’attelle à la préparation du repas en suivant scrupuleusement les indications. Je dois couper en morceaux une pièce de bœuf et préparer des carottes et des pommes de terre. Tout en travaillant, je me demande s’ils vont contrôler l’épaisseur des épluchures de légume.

Le bâillon me gêne un peu aux commissures des lèvres. J’ai mal à la mâchoire à force de garder la bouche ouverte et la boule m’empêche de déglutir, ce qui m’oblige à essuyer régulièrement la salive qui coule sur mon menton. Je dois maudire Javier une bonne centaine de fois.

Pendant que le plat principal mijote doucement, je prépare une salade de tomate. Selon les quantités indiquées dans la recette, je déduis que Maîtresse F. dîne seule ce soir.

A sept heures moins dix, Javier entre dans la cuisine. « Retire ton tablier. Tu vas apporter un pichet d’eau fraiche et l’entrée à Madame ». Je prends un plateau et rajoute un petit panier avec des tranches de pain. Estimant sans doute qu’il est risqué d’ajouter un poids supplémentaire à ma tâche, Javier se charge de la bouteille de vin.

La salle à manger est vide. Encore une fois, je suis étonnée par la taille de la pièce. Les murs sont gris, le mobilier est sobre, avec ce soupçon d’exotisme que confère le teck noir. Je pose le plat et le broc d’eau sur la grande table. Javier me désigne le vaisselier. Je dispose couverts et assiettes devant la place dévolue à Madame. Maîtresse F. arrive peu après. L’homme à tout faire s’esquive aussitôt.Maîtresse F. ne s’étonne pas de mon bâillon. Je ne peux m’empêcher, pour ma part, de remarquer son changement de tenue. Elle n’a pas quitté le bustier en cuir mais le pantalon a disparu, remplacé par une sorte de string en cuir noir et des cuissardes de la même matière, bien serrées jusqu’en haut des cuisses. Cette tenue est à la fois imposante est très sensuelle. Sans compter la cravache qu’elle tient à la main.

– Bien, dit-elle après avoir pris place à la table. Nous allons poursuivre ton éducation en abordant les différentes postures que l’esclave doit adopter en présence de sa Maîtresse. Tu devras très vite apprendre que, lorsque j’emploierai certains mots clefs, j’attends de toi que tu prennes aussitôt la position correspondante. Par exemple, quand je dis « esclave en attente », tu dois te tenir debout, les jambes légèrement écartées et les mains croisées dans le dos. Quand tu es de service à table, mets-toi dans cette position par défaut, sans que je t’en donne l’ordre.

Je m’exécute docilement. D’un léger coup de cravache, elle me fait comprendre que mes cuisses ne sont pas assez loin l’une de l’autre. Maîtresse F. boit une gorgée de vin avant de reprendre :

– Autant t’habituer tout de suite à la posture de punition. Commence par t’allonger en prenant appui sur tes genoux et tes coudes. Maintiens les pieds en l’air, ton bassin à quarante-cinq degrés, comme si tu voulais dessiner un Z. Tu dois faire en sorte de garder la tête basse et que ta croupe soit le plus haut possible. Creuse un peu plus tes reins. Le plus dur est de garder la plante des pieds vers le haut, accessible aux coups, tout comme les fesses. Parfait. Tu dois tenir ainsi tout le temps de la punition, quitte à souffrir de surcroit de crampes. Mais nous n’en sommes pas là puisque, pour le moment, tu n’as pas mérité de châtiment. Augmentons un peu la difficulté. Adopte maintenant la position d’endurance, qui comme son nom l’indique permet de tester la résistance de l’esclave à l’effort. Tu dois t’accroupir sur la plante des pieds, les jambes écartées, les mains derrière la tête. Ton torse bien droit, les épaules en arrière, le buste haut et relevé pour présenter ta poitrine. Rentre ton ventre. Ne bouge plus pendant que je mange l’entrée.

Moins douloureuse que la punition, la position d’endurance reste tout de même très inconfortable et difficile à garder. Je résiste cependant le temps que Maîtresse F. finisse les crudités, même si elle prend bien le temps de mastiquer.

– Va chercher le plat principal, ordonne-t-elle.

Je me relève difficilement et emporte le plateau à la cuisine. J’avais laissé la viande et les légumes sur la plaque éléctrique pour les conserver au chaud. Je transfère le contenu du fait-tout dans un plat en faïence. « Sers-moi » me dit Maîtresse F. une fois que je suis revenue dans la salle à manger.

Là je me rends compte que j’ai oublié de prendre des couverts. Je me précipice chercher le nécessaire dans le vaisselier. Je ne sais pas de quel côté me placer pour le service. Quelle idiote ! A tout hasard je tente une approche par la gauche pour utiliser plus facilement ma main droite. Maîtresse F. ne fait pas de commentaire. Elle lâche juste un ordre : « posture d’endurance », une fois que j’ai terminé. Je m’accroupis et c’est ici que les difficultés commencent. J’ai mal aux cuisses et aux chevilles. Au bout d’un moment, alors que Maîtresse F. continue de manger à une vitesse désespérante, mes muscles tétanisent et je me mets à trembler. Au moment où je crois être sauvée – elle a presque fini – une de mes cuisses lâche et je me retrouve un genou à terre. Je reprends aussitôt la position. Maîtresse F. ne réagit pas immédiatement. Elle sauce son assiette avec un morceau de pain avant de dire : « punition ». Je blêmis et, morte de trouille, m’exécute en adoptant la position prescrite. Maîtresse F. se lève et saisit la cravache. Je m’attendais à recevoir un coup sur les fesses mais la sentence est bien pire encore. Au terme d’un sifflement sinistre, je ressens une douleur terrible sur la plante des pieds. Mon cri est étouffé par le bâillon. Je reçois une volée de coups sur les reins, les talons et la voûte plantaire. C’est la pire correction que j’aie jamais reçue, la douleur est insupportable. De grosses larmes coulent sur mes joues. Maîtresse F. n’y prête aucune attention.

– Débarrasse la table et apporte-moi le dessert, dit-elle. Après quoi tu pourras prendre la posture d’attente.

Une fois le repas terminé, Maîtresse F. dit :

– Il est temps de nous accorder un moment de détente, qu’en dis-tu ? Ah oui, bien sûr, tu ne peux pas répondre…

Elle me débarrasse du bâillon.

– J’écoute…
– Merci Maîtresse.

Elle rapproche une chaise et s’assied. D’un geste élégant, elle retire son string avant d’ordonner : « à genoux ».

J’ai tout de suite compris ce qu’elle voulait mais, Mon Dieu, je ne l’ai jamais fait. J’ai son sexe devant les yeux. Maîtresse F. n’applique pas à elle-même ses préférences en matière de système pileux. Certes, elle fréquente régulièrement l’esthéticienne mais sans pratiquer l’intégrale. Une petite moustache, au-dessus des lèvres, orne son pubis. De près je distingue un reflet métallique. Le capuchon de son clitoris est percé d’une fine barrette. Elle est propre. Je remarque tout juste une faible odeur, discret embrun qui me rappelle que je suis en présence d’un mollusque bivalve. Ses grandes lèvres sont rouges et serrées, évitant l’étalage des plis et des replis des femmes d’un certain âge. Tant mieux car je trouverais ce spectacle un peu dégoûtant.

Elle n’ajoute qu’un mot : « lèche ». Je ferme les yeux et je tends la langue. J’essaie d’appliquer ce que j’attends d’un homme quand il me fait jouir ainsi, je commence par déposer des baisers sur les grandes et les petites lèvres, en me rapprochant peu à peu du centre du plaisir. Maîtresse F. me guide en me saisissant par les cheveux. Sa respiration devient plus bruyante et un liquide salé coule sur ma langue. Je suis, pour la première fois de ma vie, en train de lécher une femme. Rien que d’écrire cela, je ressens un plaisir pervers et l’envie me prend de laisser ma main s’égarer entre mes cuisses.

« Suce-moi, petite chienne » dit Maîtresse F. Je saisis son clitoris entre mes lèvres et j’aspire. Il est gros et gorgé de sang, comme un gland d’homme en modèle réduit. J’effectue des mouvements de la langue et de la bouche. Les cuisses de ma Maîtresse se tendent, frémissent, elle agrippe mes cheveux avec plus de force et finit par pousser un cri qui décline en un râle grave et profond.

– Arrête, dit Maîtresse F.

Je me détache d’elle. Une multitude de sentiments bizarres et contradictoires se bousculent dans ma tête pendant que je regarde mes pieds avec humilité.

– Rhabille-moi, poursuit-elle.

Je ramasse son string. Je ne l’avais pas remarqué tout à l’heure mais il comporte des attaches pour l’enfiler et le retirer rapidement. Une fois que j’ai terminé, Maîtresse F. sort de la salle à manger, sans dire un mot. Je prends son assiette et sa cuillère et quitte la pièce à mon tour.

Javier m’attend dans la cuisine.

– Je suppose que tu as faim, dit-il. Je t’ai préparé à manger.

Rien sur la table de la cuisine. Sur le sol, en revanche, une gamelle remplie de nourriture et une écuelle d’eau. C’est plus d’humiliation que je peux en supporter :

– Non, dis-je, jamais…

Je n’ai pas le temps de finir ma phrase. Javier me saisit par les cheveux et je me retrouve à quatre pattes, le nez dans la gamelle.

– J’ai fait cuire ce riz et ce steak haché pour toi. J’ai pris soin d’écraser la viande pour que tu n’aies pas besoin de mâcher. Tu as de l’eau fraîche à disposition. Du grand luxe pour une chienne comme toi ! Alors, j’aime mieux te dire que tu vas tout manger et lécher le fond du plat. Je veux qu’il soit propre, comme s’il venait d’être lavé. Interdiction d’utiliser les doigts. Si un grain de riz tombe par terre, récupère-le avec ta langue. Quand tu auras fini, tu as intérêt à me remercier !

J’ai très faim et il ne me laisse pas vraiment le choix. Pas facile de manger sans les mains. Je prends une bouchée de riz. La nourriture est fade, la viande sans goût, comme bouillie. Je fais comme il m’a dit et finis par lécher la gamelle.

Je dois laper l’écuelle pour boire un peu d’eau. Javier ne manque rien du spectacle. Il sourit, visiblement ravi du bon tour qu’il m’a joué. J’ai tellement honte d’être rabaissée ainsi, traitée comme un a****l.

– Alors qu’est-ce qu’on dit ?
– Merci Monsieur.
– Reste dans cette position. Madame t’a bien corrigée, hein ? Tu as le cul zébré de marques rouges…

Javier pose les mains sur mes fesses. Il les caresse avec douceur, sans doute pour mieux apprécier les reliefs laissés par la cravache. Je ferme les yeux, j’essaie de ne plus penser à rien.

Derrière moi, j’entends une ceinture que l’on détache, une fermeture éclair qui se baisse. Oh non ce n’est pas possible ! Et pourtant si… ce salaud ne m’épargnera pas. Déjà je sens un de ses gros doigts fouiller mon sexe sans ménagement.

– Petite salope, tu es trempée. Excitée d’avoir léché Madame, j’en suis sûr…

Il a dû nous espionner, peut-être en se masturbant. Son doigt ne tarde pas à être remplacé par un organe beaucoup plus volumineux et gorgé de sang. Ce membre est gros, la voie est étroite. Il me fait mal et quand il commence à bouger, c’est pire encore. Alors, mon salaud, tu aimes baiser les jeunettes de vingt ans sur le carrelage de la cuisine ? Il donne de violents coups de reins tout en distribuant des claques sur mon postérieur avec une sorte de rage féroce. Je sers les dents. Hors de question que je lui donne satisfaction en le suppliant d’arrêter. Ce que je subis parait bénin après la correction administrée par Maîtresse F. Heureusement, il ne s’éternise pas. Il se retire et éjacule sur mon dos en soufflant comme un bœuf. Il semble pris de remords, comme prêt à s’excuser. Avec une feuille de papier essuie-tout, il éponge les gouttes de sperme.

– Je vais t’aider à nettoyer, dit-il en reboutonnant son pantalon, et ensuite tu iras prendre une douche.

Ma trousse de toilette est posée sur une étagère dans la salle de bain. Javier, les bras croisés, m’observe pendant que je me lave les dents. Il retire les bracelets et le collier. Je me masse les poignets et les chevilles. En me tournant un peu, je jette un bref coup d’œil à mon reflet dans la glace. Tout le bas de mon dos est couvert des marques laissées par la cravache. Là où les coups se sont croisés, la peau a pris une teinte violette. Je ne mettrai pas les pieds à la piscine dans les jours qui viennent, c’est certain.

Javier ne sort pas quand je prends ma douche. Il me regarde me laver, me savonner le ventre, les seins, les parties intimes qu’il vient de ravager. Je ne proteste pas. J’ai juste envie d’aller me coucher.

Une fois que je suis sèche, il réajuste mes accessoires d’esclave et m’accompagne jusqu’à la cellule.

La porte se referme. Claquement sec du loquet. Me voici enfermée pour la nuit.

Il règne un noir total dans la pièce. Je n’ai pas vu d’interrupteur, tout à l’heure. Il n’y a pas de drap sur le lit, juste une couverture de mauvaise qualité, rêche comme du papier de verre. Peu importe, je suis épuisée et je ne tarde pas à m’endormir.

Auréline 15 – L’éducation de Line

Le journal d’Auréline II

Cher journal,

La semaine dernière, je t’ai relaté ma première rencontre avec Maîtresse F. Nous en étions restés au point où elle réservait sa réponse, quant à savoir si elle se chargerait ou non de mon éducation. Depuis, j’ai reçu un mail.

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De: Maîtresse F.
A: Auréline

Soumise Auréline,

Ta candidature a retenu l’attention de Madame. Nous t’attendons, samedi prochain à quatorze heures. Sois ponctuelle.
Même tenue que lors de ta dernière visite : chemisier blanc, jupe noire et bas assortis. Si tu déjeunes avant de venir, prends une légère collation.
Prévois également des affaires de toilettes, tu nous consacreras tout le week-end.

Maîtresse F.
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Je pense avoir fait mon choix. Je préfère Madame. Maîtresse me rappelle trop l’école. Maîtresse, Maîtresse, j’ai mal à la tête. Je peux aller à l’infirmerie ?

Reprenons le récit à la journée de samedi. Je suis devant la porte de l’immeuble. J’ai aussi peur que lors de la première fois, sans doute parce que toute cette aventure prend un aspect très sérieux et que j’ai le sentiment d’avoir atteint un point de non-retour.

A ma grande surprise, un homme vient ouvrir. Aussitôt je baisse le regard avant de murmure :

– Bonjour Monsieur. Je suis attendue par Madame.

L’homme est grand, musclé, les épaules larges. Il porte un costume noir avec l’élégance d’un professeur de danse italien. Sous les cheveux gominés, le visage n’est pas très beau, le nez épaté, les joues tavelées de marques d’acné mal soignée mais son large menton et ses yeux vifs lui confèrent un certain charisme. Je sais déjà que, s’il le désire, je ne serai qu’un jouet pour lui.

– Suis-moi, dit-il.

Je l’accompagne jusqu’au petit salon ou Madame F. m’accueille. Je la salue. Elle porte un ensemble noir, une sorte de tenue de cavalière, pantalon, bottes et bustier. Un décolleté en V dévoile le sillon entre ses seins.

– Javier ne s’est sans doute pas présenté, dit-elle. Je vais donc le faire à sa place. Il assure les fonctions de chauffeur et d’homme à tout faire. Tu devras lui obéir en tout, sans discuter, lorsqu’il te dira de faire quelque chose, comme si je parlais à travers lui.

Elle lui fait un petit geste de la main : « Javier, vous pouvez disposer. »

Un moment de silence et de gêne. Je me balance d’un pied sur l’autre sans trop savoir quoi faire. « Déshabille-toi, qu’est-ce que tu attends ! » Soulagée qu’elle ait attendu que Javier sorte de la pièce, je retire mes affaires et les pose sur une chaise. Maîtresse F. me fait signe d’approcher. Devant moi, trône sur un coussin rouge, un collier en cuir. Très beau. Sur le devant un gros anneau métallique en forme de serpent. De nouveau l’Ouroboros, comme pour le bijou que Maître J. m’avait offert. Sur la nuque, le collier ferme avec un petit cadenas. Il y a quatre autres accessoires en cuir, basés sur le modèle du collier, pour les poignets et les chevilles. Je suppose que l’on peut assembler les deux bracelets pour en faire des menottes.

Maîtresse F. vérifie l’ajustement des bandes de cuirs. « Je les ai fait faire sur mesure, rien que pour toi ». Elle les ferme sans trop serrer. Elle s’éloigne un peu pour admirer le résultat. La satisfaction se lit sur son visage. « Dorénavant, à chaque visite, tu viendras dans cette pièce, entièrement nue. Tu attendras que Javier te sangle avec ces accessoires, ou d’autres que je choisirai selon mon envie. Ensuite, et seulement à ce moment-là, tu pourras te présenter devant moi. Tu as compris ? » Je réponds : « Oui Madame ».

– Bien. Maintenant tu vas avoir droit à une visite guidée des lieux, à commencer par le donjon.

Pieds nus sur le parquet, je marche à la suite de Maîtresse F. Le couloir me parait interminable. Je ne suis pas familière des lieux mais j’ai l’impression que l’appartement occupe un étage entier de l’immeuble. Nous arrivons dans une vaste pièce sans fenêtre. Les parois sont couvertes d’un revêtement isolant. Que ce lieu soit insonorisé ne me rassure en rien. Une grande croix en bois, en forme de X, se dresse sur le mur face à la porte.

La pièce comporte de nombreux rangements et étagères. Maîtresse F. me laisse tout le loisir de regarder, bien que je n’ose pas bouger, encore moins m’approcher. Il y a là des cravaches et des martinets, des badines et des battoirs, des pinces en métal, toute une panoplie de plugs et de godes, une ceinture sur laquelle ajuster lesdits phallus, un carcan en bois, avec des trous pour passer la tête et les poignets. Pendus à des patères, une collection de cordes de teintes et de longueurs différentes, des barres en aluminium et différentes systèmes de fixations vissés au sol. Je me dis qu’il y a là tout un attirail à vocation professionnelle. Si Madame officie auprès de riches clients masochistes, sans doute gagne-t-elle bien sa vie.

– Tu es bien songeuse, me dit-elle.
– C’est que vous êtes bien équipée, Madame…

Elle rit.

– Approche-toi du bureau.

Elle parle de la console. Un papier est posé dessus.

– En tant qu’étudiante en droit, je ne t’apprends rien en te disant que ce document n’a aucune valeur mais nous autres adeptes aimons beaucoup les rituels. Lis-le et signe.

Voici, en résumé, ce que je découvre sur le beau papier vélin couleur ivoire :

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Contrat de soumission

Le présent contrat définit les règles et obligations pour les deux parties ci-dessous décrites :

– Maîtresse F. dite « la Maîtresse »
– Aureline P. dite « la soumise »

Toutes les clauses de ce contrat concernant la Maîtresse s’appliquent également aux personnes qu’elle définira nommément comme ses délégués.

Il prend effet au jour indiqué en bas de ce document, sans date de fin. Toute modification ne saurait être effectuée sans l’accord des deux parties.

1. Obligations de la soumise

La soumise, en son âme et conscience, accepte de devenir la propriété de Maîtresse F. et de lui abandonner son libre arbitre.

La soumise s’engage à obéir à tous les ordres de sa Maîtresse quelle qu’en soit la nature. Ceci inclut l’ensemble des tâches qu’elle est en mesure d’accomplir physiquement, services sexuels inclus.

La Maîtresse pourra utiliser à sa convenance tout accessoire à destination sexuel sur la soumise.

La soumise n’est pas autorisée à porter des tenues non validées par la Maîtresse. De même la soumise devra porter tout vêtement que la Maîtresse trouvera bon de lui confier.

La soumise ne parlera qu’à l’invite de la Maîtresse ou de l’un(e) de ses délégué(e). Elle s’exprimera alors en toute sincérité, sans masquer ses envies ou ses dégoûts. Toute transgression de cette règle donnera lieu à une punition définie par la Maîtresse. L’impertinence et le manque de respect seront plus particulièrement châtiés.

La soumise ne pourra en aucun cas se plaindre des traitements et humiliations subis.

La soumise n’entretiendra de commerce charnel qu’avec les individus, hommes ou femmes, autorisés par la Maîtresse. Une stricte chasteté est requise en dehors des séances. La Maîtresse se réserve le droit d’employer des accessoires de contrainte à cette fin.

Toute relation sentimentale de la soumise avec une autre personne que la Maîtresse entraînera la résiliation du présent contrat.

2. Droits et engagements de la Maîtresse

Même si le temps libre de la soumise est consacré au bien-être de sa Maîtresse, cette dernière s’engage à laisser la soumise visiter sa famille et, loin de l’empêcher de poursuivre ses études, l’encouragera à atteindre l’excellence dans le domaine qu’elle a choisi.

La Maîtresse, ne s’adonnera à aucune pratique provoquant des dommages physiques irréversibles sur le corps de la soumise.

Toute modification corporelle devra faire l’objet d’un accord préalable entre la soumise et la Maîtresse.

Si la Maîtresse pressent une mise en danger de l’équilibre psychologique de la soumise, elle s’efforcera de ménager celle-ci.

La Maîtresse et la soumise conviendront d’un « safe word » que la soumise utilisera si son intégrité physique est menacée, en cas de douleur extrême par exemple. Si la soumise n’est pas en mesure de parler, un geste défini au préalable remplacera le « safe word ».

L’ensemble de ces règles s’appliquent également aux délégués de la Maîtresse.

Fait en deux exemplaires, datés et signés.
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Très vite, sans me laisser le temps de réagir, Maîtresse F. saisit ma main gauche et, à l’aide d’un poinçon, me pique le pouce. Elle trempe l’extrémité d’une plume dans la petite blessure. « Signe avant que l’encre ne coagule » dit-elle en me tendant la rémige ensanglantée.

Je pose mon paraphe en bas de la page.

– Auréline, c’est joli mais trop long, dit Maîtresse F. Mieux vaut un prénom d’une seule syllabe pour les servants, cela demande moins d’effort de mémoire et claque mieux quand on vous convoque. Je t’appellerai donc Line. Considère-toi comme baptisée par le sang. Pour la communion, nous verrons plus tard.

Je suce mon pouce endolori sous le regard amusé de Maîtresse F. Elle reprend :

– Nous devons définir le « safe word ». Il faut que ce soit un mot peu utilisé et assez court. Une idée ?
– Azur, Madame.
– Très bien. Sais-tu à quoi fait référence le terme « débourrage » ?
– Oui Madame, il est relatif à l’élevage des chevaux.
– Dans ce cas tu n’auras pas de mal à filer la métaphore avec moi. Disons que tu es une jeune jument que nous allons habituer à supporter le licol et la selle et, pour finir, la monte.

Je frissonne à l’écoute de cette phrase qui implique pour moi une forme de menace sourde. Je crois pouvoir accepter d’être attachée, fouettée peut-être, mais je ne sais pas comment je réagirai si je dois m’exhiber ou que Maîtresse F. fouille à nouveau mon intimité, d’autant plus que ce qu’elle laisse entendre va beaucoup plus loin. Je m’imagine, les yeux bandés, touchée, pénétrée par des mains et des sexes inconnus. J’éprouve un mélange étonnant de désir, d’appréhension et de répugnance.

– Il existe deux méthodes pour débourrer les chevaux, reprend Maîtresse F. La première consiste à monter l’animal sans aucune préparation et le forcer à supporter la présence du cavalier sur le dos et la seconde, plus progressive, nécessite d’habituer le cheval au contact d’accessoires diverses, comme la brosse par exemple, pour l’amener à accepter la selle et la bride dans un premier temps. Pour ma part j’emprunte une voie médiane, comme tu vas pouvoir le constater. Je m’adapte à la pouliche. Tu m’as déjà montré ton obéissance. Nous pouvons donc passer à l’étape suivante sans hésiter. Pour commencer, nous allons te montrer l’utilité des bracelets. Tu vas devoir passer une épreuve et il sera plus facile pour toi d’être immobilisée pour l’endurer.

Maîtresse F. m’indique une certaine position que je dois prendre, debout, les bras joints devant moi, les reins creusés. Elle accroche mes poignets à l’anneau dans le mur. Elle me dit d’écarter les jambes et place une barre en métal fixée aux chevilles pour les maintenir écartées.

– Regarde, voici le premier accessoire auquel ton corps va devoir s’habituer.

Elle vient de saisir une longue cravache noire dont elle agite l’extrémité juste sous mon nez. D’instinct, je recule et les entraves me font perdre l’équilibre, déclenchant des sensations douloureuses aux poignets et aux chevilles. A peine ai-je le temps de me reprendre que Maîtresse F. presse la cravache sur ma gorge agitée par l’angoisse. Elle descend, effleure la pointe de mon sein gauche avec la claquette. La sensation n’est pas désagréable, le téton se dresse sous la caresse. Mes dents mordent mes lèvres. Etrange de noter qu’un instrument de punition me procure du plaisir. La cravache explore mon ventre en cercles concentriques. Jusqu’où va-t-elle aller ? Non, elle évite le pubis. Elle passe de l’autre côté, sur la nuque, longe la colonne vertébrale et finit par suivre l’arrondi des fesses. Je ne tremble plus, je suis sage et immobile.

– Passons à l’ustensile suivant.

Maîtresse F. me montre une longue baguette en bois. « C’est une badine en rotin, dit-elle. A la fois très souple et résistante. » Elle fait quelques mouvements dans les airs et la badine siffle lugubrement. « Je ne veux surtout pas que tu penses m’avoir déplu et que ce qui va suivre résulte d’une attitude inacceptable. Ton comportement, cependant, n’est pas exempt de défaut. Tu n’aurais pas dû reculer à l’approche de la cravache. Je dois te corriger pour cela. Il faut également que, quand je te menacerai d’une punition, tu saches à quoi t’attendre. Je vais te donner dix coups. Ni trop forts, ni trop faibles. Tu vas devoir compter, sans trembler, à chaque fois que la baguette touche ta peau. Si tu t’arrêtes de compter, si tu bouges ou si tu te trompes, je recommence depuis le début. »

A peine a-t-elle fini sa phrase que la baguette siffle à nouveau mais, cette fois, elle claque sur mes fesses. Je crie. « Un coup d’essai. Il ne compte pas, tu n’étais pas prête ». Elle frappe à nouveau. Je dis « une ». Deux. Trois. Entre chaque coup, elle me laisse le temps d’apprécier la brûlure qui suit le choc initial. Six. Sept. La badine revient sur des zones qu’elle a déjà touchées, intensifiant la douleur. Neuf. Dix.

Mes fesses sont en feu. Des larmes coulent sur mes joues. Madame F. fait glisser la baguette entre mes cuisses. Elle remonte jusqu’à toucher mon sexe, écartant les grandes lèvres, provoquant un frisson de plaisir. Quand elle me montre l’extrémité de la badine, je constate que le bois est mouillé. « Tu n’étais pas censée apprécier ! »

Je balbutie :

– Je vous demande pardon Madame.
– Nettoie !

Je tire la langue et lèche la baguette. C’est tout à fait dégoutant mais je ne peux pas résister. Madame fait de moi ce qu’elle veut.

Soudain, elle s’arrête et actionne un interrupteur. Quelques instants plus tard, j’entends la porte s’ouvrir. Je tourne la tête le plus possible pour identifier qui vient d’entrer dans la pièce. Ce que je craignais est arrivé. Javier se tient à deux mètres à peine. Il observe mon corps nu, mes fesses rouges. Comme j’ai honte !

– Approche, dit Maîtresse F. à l’homme. Notre petite jument doit apprendre à supporter ta présence et ton contact. Elle a peur mais elle ne peut pas s’échapper et qui sait, peut-être appréciera-t-elle ce qui va suivre ? Allez touche-la, je te connais, tu en as envie.

Maîtresse F. a parlé comme si je n’étais qu’un simple animal de compagnie. Après tout, c’est écrit dans le contrat, je suis son esclave.

La main de Javier se pose sur mon dos. Elle est presque douce, il fait preuve d’une délicatesse que je n’avais pas anticipée. Il me caresse et cet acte parait délicieux après le feu de la baguette. Je suis incapable de retenir un gémissement quand il se colle contre moi. Je sens son sexe dur, à travers l’étoffe du pantalon, cogner contre ma cuisse. Ses mains en coupe enserrent mes seins, ses doigts touchent mon ventre, viens, oui, plus bas, je t’en supplie, entre en moi, fais-moi jouir.

Non. Maîtresse F. l’arrête. Elle me détache.

– Prends le repose-pied là.

Elle me désigne une petite banquette basse de style Louis XV couverte d’un tissu de velours rouge.

– Mets-toi à genoux. La queue de Javier est le troisième et dernier instrument que tu connaitras aujourd’hui. Je veux que tu frottes son gland sur ta peau, que tu en apprécies la texture. Vous allez devoir vous accoutumer l’un à l’autre. Commence par dégrafer sa braguette.

Mes mains s’agitent maladroitement. Maîtresse F. continue :

– Défais le bouton et la ceinture.

Le slip de Javier est tendu d’une grosse bosse. Je peine encore à estimer les dimensions de la chose mais je crois qu’il s’agit là du plus gros sexe masculin que j’ai jamais vu, un minimum de vingt centimètres, sans compter la circonférence proportionnelle à la taille… Aussitôt jaillit une remarque aussi idiote que pragmatique : cela ne rentrera jamais.

– Baisse le slip.

Voilà. La verge de Javier est devant moi. Je ne peux pas dire qu’elle soit belle mais elle n’est pas vraiment laide non plus. Elle est rose, lisse et imposante. Le gland est bien visible.

– Touche-le.

Dans un état second, je vois ma main droite se poser sur le pénis de cet homme que je ne connaissais pas il y a deux heures encore.

– Soupèse-lui les couilles.

Je fais ce qu’elle me dit. Les testicules aussi sont énormes. La peau est très fine, j’ai un peu peur de lui faire mal avec mes ongles.

– Promène la verge sur ta gorge, tes seins, je veux voir le gland toucher la pointe, oui ainsi, c’est bien. Ton corps ne t’appartient plus. Tous les hommes que je te présenterai auront le loisir de te toucher, que ce soit de leurs mains ou de leur sexe. Aucun centimètre de ton corps ne sera épargné. Considère-toi comme une fille publique à compter d’aujourd’hui, Line. Maintenant, j’attends de voir comment tu donnes du plaisir à un homme avec ta bouche. Commence par tirer la langue, je veux que tu lèches les couilles de Javier pendant que tu le branles. Non, ne va pas si vite. Masturbe-le doucement, décalotte bien le gland. Humidifie-le pénis de ta salive, je veux que tu craches, petite Line. Lèche le méat. Ouvre la bouche, prends le bout tout en continuant d’agiter la main, ces messieurs adorent cette manière de procéder. Je constate que tu n’en es pas à ton coup d’essai ! Tu donnes assez de cœur à l’ouvrage pour que j’aie envie de te récompenser. Nous verrons cela demain. Saisis les hanches de Javier de tes deux mains, rapproche tes lèvres du pubis, enfonce sa grosse queue le plus loin possible dans ta gorge, suce-le, oui, suce-le de plus en plus vite !

Javier se manifeste d’un raclement de gorge. Maîtresse F. l’interroge du regard.

– Permission de jouir, Madame, demande-t-il, je n’y tiens plus.

Le visage de Maîtresse F . se tord d’une moue dédaigneuse, comme si la demande de Javier constituait un accident malencontreux que l’on accepte parce que, au final, on le considère aussi inéluctable qu’anodin.

– Faites Javier, faites.

Je crois que j’étais un peu saoule, ivre de sexe, déboussolée, leurs paroles me ramènent brutalement à la réalité. Jamais encore un homme n’a éjaculé dans ma bouche. Je pensais réserver cette pratique à l’élu, celui qui aurait su faire chavirer mon cœur. Et, là, sous le joug de Maîtresse F. me voici rabaissée au statut de vulgaire catin, un simple réceptacle du plaisir viril d’un homme que je ne m’aime pas. Il n’est plus temps de reculer, au moindre impair je suis assurée de recevoir une correction gratinée et mes fesses se souviennent encore de la précédente rouste, alors j’accepte cette humiliation.

Javier grogne avant d’envoyer une première giclée qui glisse dans ma gorge aussitôt.

Son sperme est très abondant, impossible de tout avaler. Je recrache, j’en reçois sur le menton et les seins. Madame F. n’est pas contente, elle m’oblige à ramasser le liquide poisseux avec les doigts. « Lèche-les maintenant, je ne veux plus voir de traces et tu nettoieras aussi la queue de Javier avec ta langue ». Le goût est un peu amer, pas très agréable. Il n’a rien du délicieux nectar dont paraissent se délecter les actrices pornos.

– Assez, vous pouvez disposer dit Maîtresse F. Javier amenez notre jeune esclave au cabinet de toilette qu’elle se rafraichisse puis expliquez-lui les tâches qui lui sont dévolues. Montrez-lui sa « chambre » également.

J’identifie le sourire qui accompagne cette dernière phrase à une menace, attisant, s’il en était encore besoin, l’inquiétude sourde qui me tourmente. Décidément, ce week-end promet son lot d’avanies.

Auréline 14 – Maîtresse F.

Le journal d’Auréline I

Par demande expresse de Maître Janus, ce journal relatera mon expérience de soumise. Vous pourrez suivre, semaines après semaines, mon cheminement dans la voie de l’esclavage, voie que j’ai choisi de mon plein gré, sans aucune contrainte.

Cette première entrée revêt une importance particulière au sens où aujourd’hui, pour la première fois, j’ai fait la connaissance de ma future initiatrice. Jusqu’à présent, je ne peux pas vraiment dire que j’ai subi un asservissement réel. Des séances en ligne, un peu de bondage… Toutes ces expériences m’ont laissé sur ma faim.

Ce samedi-là, à dix heures, je me suis présentée au domicile de Maîtresse F, situé dans un grand immeuble haussmannien au cœur de Paris. Je n’avais que peu de consignes, hormis l’interdiction de porter Jean, baskets et t-shirt. J’avais donc opté pour une tenue de petite fille sage : chemisier blanc, jupe pas trop courte, bas, chaussures à talons. Lavée, parfumée, cela va de soi. A l’interphone une voix de femme, grave, me dit de monter au troisième. Je prends l’ascenseur afin d’éviter d’accélérer encore mon rythme cardiaque déjà bien trop rapide.

Maîtresse F. m’accueille. Elle doit avoir près de cinquante ans, sèche, grande, plus d’un mètre soixante-dix, très maigre, résultat sans doute d’une pratique sportive régulière. Une première pensée s’impose à moi : je ne pourrais pas l’affronter physiquement, elle aurait très vite le dessus. Elle a des mains fines, un peu ridées, avec de longs ongles vermillon. Ses cheveux, noir corbeau, sont tirés en arrière. Elle est belle, d’une certaine façon, comme les motifs écailleux d’un crotale ou le reflet bleu d’une lame de sabre japonais.

Nous n’avons échangé qu’un simple salut. Maîtresse F. prend la parole :

– Maître J. m’a parlé de toi. J’aimerais tout de même que tu me dresses ton portrait en quelques mots. Mais avant toute autre chose, je tiens à établir certaines règles. Tu vas devoir respecter une étiquette stricte. Sur la manière dont tu t’adresses à moi, je te laisse le choix entre Maîtresse et Madame. A partir de maintenant tu conserveras en toute circonstance une attitude humble, le regard rivé sur le sol. Tu ne parleras que si l’on t’interroge. Tu me vouvoieras et, sauf ordre contraire, tu ferras de même avec toutes les personnes que tu côtoieras en ma présence. Je ne tolérerai aucune familiarité. As-tu compris ?
– Oui Madame.
– Bien. Il faut que tu saches qu’à la moindre désobéissance, au moindre écart, tu devras subir une punition en conséquence, sans discuter. Si tu te résistes, tu sortiras de cette maison sans aucune possibilité d’y revenir. Aurais-tu une pièce d’identité ?

J’ouvre mon portefeuille et je lui tends ma carte nationale d’identité. Maîtresse F. après l’avoir examiné, la pose sur une tablette. Elle poursuit par un interrogatoire sur ma ville de naissance, ma famille, mes amis.

– Que fais-tu dans la vie ?
– Je suis étudiante en première année de droit.
– Tu habites encore chez tes parents ?
– Non je suis en logement étudiant.
– Cela signifie que tu as un peu de temps libre. Si j’accepte ta candidature, et tu noteras que ce n’est pas un dû, ce temps me sera intégralement alloué. Tu devras te tenir à disposition à n’importe quel moment à l’exception de tes heures de cours et examen. Tu travailleras ici si tu le souhaites. Je peux t’aider, en ce qui concerne notamment la discipline et l’assiduité. Je tiens à ce que notre relation ait un effet bénéfique sur tes études.
– Merci Madame.
– Maintenant déshabille toi.

Je retire la jupe, la pose sur un fauteuil. Je dégrafe le chemisier, lentement. Mes doigts tremblent un peu. Je suis en soutien-gorge et culotte. J’ai l’impression d’être en visite médicale ou à l’armée. Voyant que j’hésite, Maîtresse F. me tance : « eh bien qu’attends-tu ? Enlève tout ! » Mes sous-vêtements vont rejoindre la jupe et le chemisier.

– Jolis seins, dit-elle. Un corps jeune et ferme. Tourne-toi. De belles fesses, rondes et charnues. Retire tes mains, dévoile-moi ton sexe. Tu es rasée à ce que je vois.
– Maître J. le préfère ainsi, Madame.
– Il a raison. Les poils sont inesthétiques. Mais ils ont la fâcheuse habitude de repousser. Je préfère une méthode plus… radicale. Mais nous verrons cela plus tard.

Elle se lève et passe dernière moi. Elle fait alors quelque chose de très étrange. Avec un mètre de couturier, elle prend mes mensurations : tour de cou, poignets, poitrine, taille hanches, chevilles. Je n’ai pas changé de position, je ne bouge pas.

– Tu vas prendre place sur ce fauteuil, les jambes bien écartées, un pied sur chaque accoudoir.

J’obéis, sans pouvoir dissimuler mon embarras. Même chez le gynécologue, je ne m’exhibe pas ainsi. Et Maîtresse F. va m’apprendre que je peux être encore plus exposée et nue.

– Ecarte les grandes lèvres avec les mains.

Dans un état second, je fais ce qu’elle m’a ordonné. Elle se penche. Elle est à genoux, à mes pieds, le visage à quelques centimètres de mon sexe.

Sa main se pose sur mon ventre, descend, elle effleure mon clitoris du bout de l’ongle, impossible de réprimer un frisson.

– Sensible, dit-elle. Lève les bras.

Je m’exécute. Elle glisse un doigt, il entre si facilement, je suis tellement mouillée. Oh mon Dieu, je n’arrive pas à y croire, une femme me touche la chatte, me pénètre, je n’aurais jamais cru qu’une chose pareille m’arriverait et que je me laisserais faire comme une poupée.

– Tu es accueillante, chaude et humide.

Sa voix se fait enjôleuse, caressante, ajoutant à mon trouble. Je suis sous hypnose.

– Dis-moi, est-ce qu’un homme t’as déjà fait jouir juste en te baisant ?

Je pense : « en quoi est-ce que cela vous regarde ? » Mais je réponds malgré moi, avec une voix qui me parait presque étrangère :

– Non Madame. Avec la langue et les doigts, quelques fois, mais pas avec son sexe.

Elle retire son annulaire plein de cyprine pour l’introduire dans l’autre orifice, plus étroit et inexploré. La surprise me fait sursauter, je me cabre, tente de lui échapper mais elle me tient fermement. J’ai peur qu’elle m’écorche mais non, je n’ai pas mal, juste une gêne, comme une légère constipation.

– Hum, on dirait bien que tu es vierge de ce côté, personne ne t’a jamais sodomisée ?

Je réponds que non, un petit ami a bien essayé, une fois, mais il m’a fait mal, j’étais trop contractée et nous avons arrêté.

– C’était un idiot qui ne savait pas s’y prendre, dit-elle. Puis après une courte pause, elle ajoute : tu peux te rhabiller. N’oublie pas de récupérer tes papiers avant de sortir. Je te ferai une réponse dans la semaine, sans faute.

Auréline 13 – le retour de Monsieur

De: Auréline
A: Anne-So
Objet : Re:News

Coucou ma louloute,

Désolée pour mon silence de ces derniers jours mais les rebondissements n’ont pas cessé de se multiplier et ma vie intime n’a jamais été si compliquée… Je t’ai déjà parlé de ce Monsieur charmant avec qui j’ai une relation si bizarre. Disons qu’il possède un certain… talent que j’apprécie mais l’on doit à chaque fois passer par des détours alambiqués avant qu’il ne parvienne à ses fins. Le pire : il ne cessait de me proposer de l’argent. Tu m’imagines, moi, entretenue par un Sugar Daddy ? Je ne crache pas sur le fric, loin de là, mais, enfin, je ne suis pas de ces filles là… Tu vois ce que je veux dire ? J’accepte par obéissance envers Maïtre J. C’est tout. Nous sommes tout de même parvenus à un accord avec Monsieur : il me prête sa carte bleue en période de soldes.

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De: Auréline
A: Janus
Objet : Nouvelle visite

Cher Maître,

J’ai de nouveau rendu visite à Monsieur, votre ami, dans sa chambre d’hôtel. Nous avions préparé cette séance, en partie, la semaine précédente. Il avait insisté pour m’acheter un bustier et un string en cuir, des bas noirs autofixants. Je dois avouer que je me sentais un peu ridicule, cet attirail de dominatrice sied peu à ma réserve habituelle. Il faut que je confesse également que, au fil de mes rencontres avec Monsieur, je suis devenue adepte de son jeu de langue. Je me couche, les jambes écartées, offerte, et il accomplit ce qu’il appelle ses « génuflexions ». Dans cette position, je l’avoue sans honte, pendant qu’il me lèche, je pense à vous et je jouis. Il s’agit là de l’acte le plus intime qu’il s’autorise. Il ne m’a jamais pénétrée ni même embrassée. Le piédestal où il m’a placé est bien trop haut pour cela.

Revenons-en à notre dernière soirée. Cette fois, il voulait être puni. J’ai enfoncé le talon si pointu de mes bottes dans sa cage thoracique. S’il avait mal, je n’en ai rien su. Sur son visage je ne lisais qu’une expression extatique. Il s’est allongé à plat ventre sur le lit et j’ai donné des coups de martinet sur ses fesses nues. Je l’ai entendu dire : « plus fort je vous en supplie ». Je l’ai flagellé avec toute la vigueur dont j’étais capable, à m’en faire mal au bras. Je n’y ai pris aucun plaisir. Il m’a demandé de fouiller dans sa valise. J’y ai trouvé un gode-ceinture. Il m’a dit de l’enfiler. Je ne me sentais pas très bien, un peu nauséeuse mais j’ai voulu aller jusqu’au bout. Je l’ai sodomisé, sans lubrifiant. Il a crié. A un moment, j’ai saisi sa verge. « Non, m’a-t-il dit, je n’en suis pas digne ». Il m’a laissé faire, pourtant, et il a taché les draps de longues giclées blanches. Il m’a demandé de rester, pour la nuit. Il dormirait au pied du lit comme un bon chien. Je lui ai répondu que non, je ne pouvais pas. J’en suis désolée. Me le pardonnerez-vous ?

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De: Janus
A: Auréline

Ma chère esclave,

Je comprends bien que ce que tu as connu jusqu’ici, par mon entremise, n’était que l’aperçu d’un champ d’expérience à venir et que tu souhaites, maintenant, vivre de manière plus complète ta condition de soumise. Sache que nos phantasmes peuvent devenir réalité, même si le prix est souvent plus élevé que l’on imagine. Je pense que tu es prête, et la séance avec Maîtresse C. en constitue la preuve, à te présenter devant une bonne amie à moi afin de commencer ton dressage. Tu trouveras son adresse ci-dessous. Maîtresse F. t’attend, samedi prochain à dix heures précises. Sois ponctuelle, elle est très pointilleuse sur ce chapitre.

 

Auréline 12 – jeux de cordes (2ème partie)

De : « Auréline »
A : « Janus »
Objet : Re: Nouvelle séance

Cher Master J.,

Je me conforme à vos exigence en vous relatant cette nouvelle séance par le détail. Quitte à encore une fois vous paraître bien naïve, je dois avouer que je ne m’attendais pas à un accueil aussi sympathique. Mais je vais trop vite. Commençons par le lieu. Une banlieue proche de Paris, bien différente de l’affreuse zone d’activité de ma première expérience de modèle – je passerai sous silence l’hôtel minable près de Pigalle, lors de mon entrevue avec Monsieur.

Maîtresse Claudia m’invite elle-même à entrer. Elle est charmante, pas beaucoup plus vieille que moi en fait, parle très bien le français, avec un léger accent agréable à l’oreille. Il émane d’elle une impression de douceur mêlée d’autorité naturelle. Elle me demande de sa voix suave de retirer mes chaussures. Nous entrons dans un grand loft éclairé par une impressionnante verrière. Je peine à calculer la hauteur sous plafond. Au milieu de la pièce, une pyramide, assemblage de trois robustes tiges de bambou nouées à leur sommet, doit atteindre plus de deux mètres. N’ayant reçu aucun consigne vestimentaire, je ne porte qu’un jean et une chemise.

« Dois-je me dévêtir ? » demandé-je. Elle sourit : « non, tu verras, c’est inutile ». Une petite pause. Elle reprend, toujours souriante : « tu dois juste mettre le masque, je suppose que tu l’as apporté… Disons qu’un peu d’isolation sensorielle fait partie du dispositif ». Je sors le masque de mon sac et le lui tend. Elle s’en saisit d’un geste très doux, passe derrière moi et me couvre les yeux. « Laisse-toi guider par ma voix » chuchote-t-elle près de mon oreille. Privée de la vue, je remarque une musique très douce, à peine audible. Je crois reconnaître des bols tibétains.

« Tu dois me faire confiance, reprend Maîtresse Claudia. Même si nous nous connaissons à peine ». Tout en parlant, elle défait un à un les boutons de mon chemisier.

– Lève un peu les bras.

Elle ne retire pas mon soutien-gorge. Je sens le contact de la corde, douce comme du coton. Elle fait plusieurs tours, au-dessus et en-dessous de mes seins. J’imagine que le photographe est là, qu’il fait son travail. Cela contribue à mon excitation.

Maîtresse C. poursuit mon déshabillage. Je n’ai plus de jean. Elle replie une de mes jambes contre la cuisse et l’attache. Mon équilibre est précaire. Je commence à osciller. Toujours la musique, étrange. Je me sens bizarre, tout s’embrouille. Elle me soutient. Je me colle contre elle. Je tends mes lèvres. J’aimerais tant qu’elle m’embrasse. Jamais je n’avais ressenti cela pour une femme.

Elle susurre : « Souviens-toi de ce que j’ai dit. Tu dois me faire confiance. Je vais te lâcher. Tu ne tomberas pas. »
Je ne chute pas. Je bascule, je tourbillonne. Un petit cri de surprise m’échappe. Les cordes qui m’enserrent doivent être liées à la structure en bambou. J’ai l’impression de flotter, à trente centimètres du sol. La main de Maîtresse C. m’effleure à peine, d’une légère poussée, elle me fait danser. Je perds la notion du temps. Au bout de ce qui paraît des heures, Maîtresse C. me dit qu’il est temps d’arrêter. Je lui demande de continuer, encore un peu. « Non, dit-elle, ce n’est pas raisonnable de prolonger plus longtemps la première séance ».

Elle me détache et m’aide à m’asseoir. Sur une table basse, elle a disposé du thé et des gâteaux. Le photographe est parti. Il est resté d’une discrétion absolue. Nous discutons un peu, principalement de mes études. Nous ne parlons pas de ce qui vient de se produire. Maîtresse C. me dit qu’elle a un autre rendez-vous. Au moment de prendre congé, elle me claque une bise, comme à une bonne copine. « A une autre fois, chuchote-t-elle. Si un jour tu viens à Berlin, pense à moi. »

Ainsi se termine le récit de cette nouvelle expérience qui s’est avérée exténuante. Je vous prie de m’excuser et prends congé. Je crois que je vais dormir pendant deux jours.

Bien à vous, cher Maître,
Auréline.

Auréline 11 – jeux de cordes (1re partie)

De : Anonymous
A : Janus
Objet : Modèle

Cher ami,

J’ai déjà eu l’occasion de te dire que j’étais ravi de la séance photo avec ta petite protégée. Elle s’est très bien comportée, d’une docilité exemplaire. Ce qui m’amène à la démarche de ce jour : j’aimerais de nouveau te l’emprunter pour une session extraordinaire. Notre connaissance commune, Maîtresse Claudia est en visite à Paris la semaine prochaine. Elle m’a proposé de photographier une série de performances. Dans cette perspective, nous allons avoir besoin de modèles d’où ma requête. Si j’obtiens ton accord, je te communiquerai le lieu et la date.

Bien à toi,
A.

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De: Auréline
A: Anne-So
Objet : Re:News

Hello,

Le photographe veut de nouveau faire appel à moi. Maître J. a parlé d’une séance de « kinbaku ». Première fois que j’entendais parler de ce terme, j’ai encore dû faire des recherches. Il s’agit de l’art traditionnel japonais du bondage. Un autre mot est employé plus fréquemment à ce sujet, « shibari ». Il fait référence au simple fait d’attacher une personne avec des chordes. « Kinbaku » a une connotation plus esthétique. C’est un job bien payé et tous les participants ont l’air très sérieux. Une spécialiste vient d’Allemagne, elle n’est là que pour peu de temps. J’appréhende un peu la séance mais je crois que l’expérience promet d’être enrichissante.

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Shibari
Article extrait du Wiktionnaire

Étymologie
Du japonais 縛り, shibari (« attacher »)

Nom commun
shibari \ʃi.ba.ʁi\ masculin

  1. Bondage japonais à caractère sexuel ou artistique.
  • Une jeune femme est morte samedi à Rome et une seconde est dans un état très grave à la suite d’une séance de shibari (qui signifie en japonais « attaché lié »), une antique technique japonaise de bondage. — (Le shibari, jeu érotique mortel. sur www.lepoint.fr, 13 septembre 2011)

Auréline 10 – les bottines

Les devantures des sex-shops et des peep-shows se ressemblent toutes. Nous marchons un moment. Monsieur ouvre une porte et m’invite à entrer. Nous sommes dans le hall d’accueil d’un hôtel. Sous une lumière glauque trône un réceptionniste au visage blafard. Il me fait penser à un croque-mort.

– Pour la nuit ?
– Non pour une heure.

Monsieur paie d’avance le montant indiqué. Il me fait de moins en moins penser à un gentleman. Dans la chambre il s’excuse et file aux toilettes, sa petite valise à la main. Quand il en ressort, il est torse nu, juste vêtu d’un pantalon en cuir. Je viens à l’instant de dessaouler.

– Je crois que je vais prendre congé, dis-je.

Monsieur est très déçu.

-Oh non, je vous en supplie. Ne prenez pas peur, je ne veux pas vous faire de mal. Je veux juste que vous portiez les bottines que je viens de vous acheter. Je ne vous toucherai pas. Je me tiendrai juste à genoux à vos pieds.

Après tout, pourquoi pas, si je peux faire plaisir à un vieux monsieur. Je retire mes chaussures. Il regarde mes pieds avec envie, on dirait de la gourmandise. J’enfile les bottines très lentement. Je resserre les lacets.

– Très beau, dit-il. Elles mettent bien en valeur le galbe de vos mollets.

Voila. Je suis assise sur le bord du lit. Un homme à genoux devant moi vénère mes pieds. Ce monde est un peu fou.

– Si j’osais… hasarde-t-il.
– Dites toujours.
– J’aimerais les lécher, très chère, vous montrer ma vénération.

Je lui octroie ce privilège. Monsieur s’applique, il dépose de petits baisers sur le cuir, suçote le bout et nettoie les chaussures avec la langue. J’ai l’impression qu’il s’escrime pendant des heures. Enfin, il s’arrête. Peut-être a-t-il senti ma lassitude, j’ai du mal à réprimer un bâillement.

– Je crois que ce sera tout pour ce soir. Je vous remercie infiniment.

Il saisit son portable pour appeler un taxi.

– Etes-vous satisfait Monsieur ?
– Oui, tout à fait.

Il ajoute ensuite, avant que je parte :
– Vous pouvez garder les bottines, bien entendu.

Auréline 9 – le goût de Monsieur

Nous prenons de nouveau un taxi. Monsieur dépose une petite valise dans le coffre. Je suis sous le charme et encore ivre, je crois bien que s’il se penchait vers moi pour m’embrasser, maintenant, sur la banquette arrière, je ne résisterais pas. Mais Monsieur sait garder ses distances. Il reste silencieux et en retrait. Je tente de relancer la conversation :

– Et où voulez-vous m’emmener ?

Il grimace. Je sens un léger malaise, pour la première fois de la soirée.

-J’aimerais vous faire un cadeau. Vraiment, j’y tiens. Malheureusement, nous ne trouverons des magasins ouverts que dans un quartier peu fréquentable.

– Ah… Et quel est cet endroit je vous prie ?
– Pigalle

Nous nous arrêtons devant un Sex-Shop. La vitrine me surprend un peu. Bien sûr, je m’attendais à un étalage vulgaire et coloré. De ce côté-là, je ne suis pas déçue. Des néons bleus, du flash clinquant. Peu de godemichets et d’accessoires sexuels en revanche. Beaucoup de lingerie de charme, bas, blancs, rouges, noirs, des guêpières assorties, de belles dentelles, du Licra pour les fétichistes. Je n’aurais pas pensé que cet assortiment me plaise, je suis comme une écolière dans une boutique de sucettes. La vendeuse est très sympathique. Elle demande à Monsieur ce qu’il désire. « Nous cherchons des bottines pour Mademoiselle. Elles doivent monter juste en dessous des genoux, mais le plus important ce sont les talons, plus ils seront hauts mieux ce sera. » La vendeuse s’enquiert de ma taille de chaussures. « Je crois avoir en stock ce qui vous conviendra, dit-elle. » Elle ramène des bottes en cuir. Je m’assois pour les essayer. Ce n’est pas tâche facile, les lacets sont croisés du bas jusqu’au haut, je mets une éternité à les resserrer. Quand je me lève, j’ai l’impression d’avoir pris trente centimètres. Comme la tête me tourne encore un peu, je tangue d’un bord sur l’autre. Voyant cela, Monsieur m’offre un bras secourable. « Absolument parfait dit-il ». Il ne m’a même pas laissé le temps d’exprimer mon avis. La vendeuse emballe les chaussures et nous sortons. « Venez, continuons à pied, dit Monsieur ».

Auréline 8 – Monsieur

De: Auréline
A: Anne-So
Objet : Re:News

Hello !

Un grand changement se prépare. Maître J. m’a annoncé que j’allais rencontrer quelqu’un. C’est un membre de sa confrérie, enfin son cercle bizarre dont je t’ai déjà parlé. Peut-être est-ce lui ? Qui sait ? Il m’a donné des consignes très précises sur la manière dont je dois me présenter. Une jupe noire, un chemisier blanc, les cheveux rassemblés en chignon. Et bien sûr le collier. Tu ne peux pas imaginer à quel point je suis excitée !

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De : Auréline
A : Janus
Objet : Nouvelle rencontre

Maître,
Je me suis appliquée à bien me maquiller en prévision du rendez-vous que vous avez organisé pour moi. Habillée, parfumée, avec le chignon, j’ai la très curieuse impression d’avoir pris cinq ans. Ce soir je crois que je vais aller de surprise en surprise. Pour commencer, un taxi, une grosse Mercedes noire, m’attend en bas de chez moi. Confortablement installée, je regarde les lumières de Paris défiler. Nous arrivons devant un restaurant thaïlandais. Je donne mon nom à l’accueil. Une serveuse en tenue traditionnelle, une belle robe bleue couverte de motifs dorés, m’entraine jusqu’à la table de votre ami. Ce monsieur est très bien habillé, un costume fait sur mesure et sa prestance m’impressionne en premier. J’imagine qu’il occupe de hautes fonctions dans une entreprise. Je ne remarque qu’ensuite son âge. Il a la cinquantaine bien dépassée, des cheveux blancs encore abondants. Son sourire charmeur dessine de nombreuses rides autour de ses yeux. Cet homme pourrait être mon père et pourtant je le trouve séduisant. Il se comporte de manière très courtoise avec moi. Nous nous présentons. Pour l’instant je continuerai à l’appeler Monsieur. Il me demande si je suis satisfaite du trajet et du choix du restaurant. Je lui réponds que tout est parfait et regarde ensuite la carte. Les prix sont absolument ahurissants ! Je ne pensais pas que l’on pouvait dépenser autant d’argent juste pour de la nourriture. Un serveur en veste blanche vient prendre la commande. Monsieur demande deux coupes de champagne. En entrée je prends une salade dans sa coque d’ananas. Très jolie présentation, met délicieux et un peu épicé. En plat principal du poulet à la citronnelle et au lait de coco. Nous buvons encore du vin, la tête me tourne, je n’ai pas l’habitude. Monsieur m’interroge sur ma vie d’étudiante, je m’épanche comme une pie bavarde mais il reste aimable et à l’écoute. Après une glace en dessert, il me propose une petite promenade en voiture. J’accepte aussitôt.